Le suicide des petits patrons, un drame muet dont personne ne parle.
Une femme succombe tous les 3 jours sous les coups de son mari ou de son ex. 123 en 2016. C’est une catastrophe. Mais au moins on en parle, pour mieux lutter contre ce fléau.
On sait moins que le suicide provoque la disparition de nombreux artisans commerçants, petits chefs d’entreprise … chaque année, on dit 180 (source) . Cela nous ferait un suicide tous les 2 jours …
Mais aucune analyse sérieuse n’existe, sauf peut être concernant les agriculteurs. Une étude les concernant, rapportée par France bleu et menée par SANTÉ PUBLIQUE FRANCE et la MSA constate plus de 200 suicides par an.
Que sait on de ces petits patrons :
-
2/3 des petits patrons travaillent plus de 50 heures par semaines
-
ils sont deux fois moins nombreux que les salariés à pratiquer un sport chaque jour
-
35 % des entrepreneurs n’ont pas une alimentation équilibrée
-
ils dorment en moyenne 30 minutes de moins que les salariés.
Nous sommes dans une société où le mal-être au travail ne peut être que celui des salariés et presque jamais celui du chef d’entreprise. Lui, il est jugé probablement dans l’opinion publique comme le coupable et jamais la victime de la souffrance au travail.
Si tout va bien, il s’épuise, mais c’est un moindre mal. Quand les affaires ne vont pas bien, là c’est la galère qui risque de s’installer.
« Quand une entreprise va mal, on pense systématiquement aux salariés mais on oublie la souffrance des patrons », confirme Fanny Gamelin, dont le père se suicida en 2008 quelques jours après le placement de son entreprise en redressement judiciaire.
La justice, à travers le TRIBUNAL de COMMERCE assume différentes missions et celles, entre autres, de prononcer un règlement judiciaire ou malheureusement la liquidation du commerce ou de l’entreprise, lorsque le bilan doit être déposé (*).
Pour certains, cette juridiction est perçue comme le fossoyeur de l’entreprise.
Mais c’est oublier le rôle de PRÉVENTION que peut exercer le Tribunal de Commerce à travers son Président et/ou son Greffier.
L’anticipation des difficultés des entreprises joue en effet un rôle important dans la capacité des entreprises à faire face et à surmonter ces difficultés.
L’entreprise en difficulté peut, de sa propre initiative, se mettre sous la protection de la justice, comme le Président a la faculté, lui, de convoquer le commerçant, l’artisan, le chef d’entreprise conformément notamment à l’ Article L611-2 du nouveau Code de Commerce.
Le Dirigeant est alors alerté sur les signes révélateurs des premières difficultés. Il est aidé, d’une part à prendre conscience qu’il n’est pas complètement isolé pour les affronter et d’autre part pour examiner les solutions de redressement.
Encore convient il, pour le Dirigeant, de se conformer à une obligation légale, pas toujours respectée : le DÉPÔT des COMPTES annuels au greffe du Tribunal de Commerce.
Madame la Procureure de la République l’a d’ailleurs bien rappelé lors de l’audience solennelle du Tribunal d’Auxerre en janvier 2018 : « … Veiller au dépôt des comptes n’est que le rappel d’une obligation légale, qui s’impose à tous, et dont le greffier du tribunal de commerce ne parvient pas à obtenir le respect malgré de très nombreuses mises en demeure. (L’intervention du parquet a ainsi pour but de rappeler que cette obligation est sanctionnée par l’article R.247-3 du code de commerce; qu’il s’agit d’une contravention de la 5ème classe, punie d’une amende de 1500 euros). » ( lire plus largement son intervention )
Mais si la justice commerciale n’est ni sourde ni aveugle, certains ont bien senti qu’il manquait une dimension humaine et psychologique pour venir en aide à ceux dont l’équilibre financier périclitait et qui prenaient de plein fouet une décision judiciaire remettant en cause leur statut bien sûr, leur entreprise, leur famille.
Derrière la décision implacable, il y a des hommes et des femmes, pour qui les conséquences du règlement judiciaire, de la faillite ont des répercussions bien plus personnelles : divorce, perte du logement, dépression et parfois nous l’avons dit au début de notre propos, suicide.
Il est donc absolument nécessaire que soit créé, au sein du Tribunal, mais mieux en dehors, un lieu d’écoute, d’accompagnement, de soutien, de conseil . Cela a été mis en œuvre, auprès d’un certain nombre de juridictions, depuis une initiative du Tribunal de Commerce de Saintes remontant à quelques années.
(*) NOTA important : pour les agriculteurs, les professions libérales, les sociétés civiles, les associations, le tribunal de Commerce n’est pas compétent c’est le Tribunal de Grande Instance qui l’est. Voir compétences des juridictions.
Vous avez raison, c’est dramatique! Les salariés des petites entreprises ne se rendent pas toujours compte de ce que vivent leurs patrons qui se demandent s’ils vont réussir à payer leurs salaires et les charges de l’entreprise. Ils se payent en dernier avec ce qui reste, travaillent énormément et vivent un stress intense.