Didier GANIER de part sa fonction est spécialiste du logement. Il expose avec précision le contenu de la loi ALUR.
La loi du 24 mars 2014 pour l’accès au logement et un urbanisme rénové, dite loi « ALUR » a pour objectif de combattre la crise du logement marquée depuis de nombreuses années par une forte augmentation des prix, une pénurie de logement et une baisse du pouvoir d’achat des ménages.
La loi ALUR est organisée en quatre titres qui traduisent les objectifs qu’elle vise.
Favoriser l’accès au logement
En premier lieu, il s’agit de favoriser l’accès de tous à un logement digne et abordable. Ce premier titre porte essentiellement sur les rapports locatifs dans le parc privé, le renforcement de la formation, la déontologie et le contrôle des professions de l’immobilier et le parcours de l’hébergement au logement.
La loi renforce la protection des locataires de manière importante, mais semble rechercher un équilibre avec notamment la création de la garantie universelle des loyers (GUL) qui vise à permettre aux bailleurs d’être sécurisé en matière de paiement de loyer.
De nouvelles dispositions sont prises pour améliorer la prévention des expulsions. Elles s’appuient sur le plan pluriannuel contre la pauvreté et pour l’inclusion sociale adopté en janvier 2013 qui a identifié deux axes à améliorer :
– traiter les impayés le plus en amont possible
– renforcer le rôle des Commissions de Coordination des Actions de Prévention des Expulsions Locatives (CCAPEX).
Réforme de certaines professions
La loi ALUR réforme également en profondeur certaines professions immobilières, sur la base d’un constat de pratiques discutables en matière de tarifications, de non-respect de leurs obligations et de beaucoup d’opacité dans leur exercice professionnel.
C’est ainsi que l’on retrouve dans le texte un renforcement de la formation, de la déontologie et du contrôle de ces professions. L’enjeu étant de restaurer les conditions de la confiance avec le consommateur et lui garantir une meilleure protection.
Il est donc prévu la création d’instances de régulation pour la profession : un conseil national de la transaction et de la gestion immobilière et une commission de contrôle des activités de transaction et de gestion.
Veille sociale
La facilitation du parcours de l’hébergement vers le logement se concrétise par l’inscription dans la loi du dispositif de veille sociale organisée à partir des Services intégrés d’accueil et d’orientation (SIAO) en vue de les renforcer. Le SIAO devient une plateforme départementale unique, couvrant le volet urgence et le volet insertion/logement accompagné.
Ses principales missions sont le recensement de toutes les places du parc d’hébergement, la gestion du service d’appel téléphonique d’urgence dénommé “115” et la production de données statistiques d’activité, de suivi et de pilotage du dispositif.
Le Comité Régional de l’Habitat voit ses compétences étendues au volet hébergement. Tout comme le Plan Départemental d’Action pour le Logement des Personnes Défavorisées (PDALPD) qui doit intégrer la thématique hébergement (PDALHPD).
La copropriété
Le second titre de la loi ALUR modifie le régime juridique de la copropriété. Partant du constat que les acquéreurs sont souvent insuffisamment informés et ne mesure pas les conséquences d’un achat en copropriété et qu’il existe des difficultés récurrentes de gouvernance (absentéisme en assemblée générale, gestion contestée) qui sont à l’origine de relations parfois conflictuelles entre syndic et copropriétaires.
Les modifications portent donc principalement sur la prévention des difficultés des copropriétés et visent en particulier à faciliter la réalisation des travaux. Elles encadrent également les modalités de rémunération des syndics.
Habitat indigne
La lutte contre l’habitat indigne est également revue par la loi ALUR qui vise à donner des moyens nouveaux aux organismes payeurs des aides au logement, ainsi qu’aux EPCI et, à défaut, aux communes, pour obliger les bailleurs à réaliser les travaux de mise en conformité et proposer des logements répondant aux caractéristiques de la décence.
Les acteurs de l’habitat concernés par l’habitat indigne bénéficient d’une boite à outils étoffée, mais encore insuffisamment utilisée. Certaines actions sont freinées du fait de la complexité du jeu d’acteurs et du nombre important de polices spéciales. Les objectifs de la loi ALUR sont de simplifier et rendre plus efficace les procédures en allant vers un acteur unique des polices de l’habitat : l’EPCI .
On constate également un renforcement du dispositif coercitif pour obtenir des propriétaires l’exécution des travaux en augmentant les pressions financières à leur encontre. Un point particulier concerne la diversification des condamnations envers les « marchands de sommeil ».
Politiques publiques du logement.
Le titre III de la loi vise à améliorer la lisibilité et l’efficacité des politiques publiques du logement.
On y retrouve un volet consacré au logement social qui est basé sur des propositions issues des travaux de concertation de tous les acteurs impliqués dans le système d’attribution de logements sociaux. La loi comporte différentes mesures visant à simplifier la procédure de demande de logement social, à renforcer l’information des demandeurs et à améliorer l’efficacité de la gestion des demandes.
La loi prévoit un droit à l’information des demandeurs et la mise en place d’un dispositif de gestion partagée des dossiers de demande de logement social sur le ressort territorial de tout Établissement public de coopération intercommunale (EPCI) doté d’un Programme local de l’habitat (PLH) qui doit, avec l’ensemble des acteurs concernés, instaurer un plan partenarial de gestion de la demande de logement social, ainsi qu’un service d’information des demandeurs de logement.
Des aménagements sont apportés à la prise en compte des ressources pour l’accès au logement social, aux règles de calcul du loyer de solidarité ainsi qu’aux modalités de révision des loyers.
D’autres dispositions concernent la gouvernance de la participation des employeurs à l’effort de construction ou les missions de l’ANAH.
Dans son dernier titre, la loi consacre 51 articles au droit de l’urbanisme avec l’objectif de faciliter et accroître l’effort de construction de logements, tout en freinant l’artificialisation des sols et en luttant contre l’étalement urbain.
Pour concilier ces deux objectifs prioritaires, elle prévoit de moderniser les documents de planification et d’urbanisme, et de prendre un certain nombre de mesures visant à favoriser la densification des zones déjà urbanisées, afin d’éviter la consommation d’espaces naturels et agricoles.
Parmi les principales mesures de la loi, peuvent être citées le transfert automatique de la compétence Plan local d’urbanisme (PLU) aux intercommunalités, le renforcement du rôle intégrateur du Schéma de cohérence territorial(SCOT), les évolutions en matière de droit de préemption, ainsi que les dispositions en matière de pollution des sols. Ces mesures structurelles viennent compléter les mesures d’urgence issues de la loi du 1erjuillet 2013 habilitant le gouvernement à adopter des mesures par voie d’ordonnances pour accélérer les projets de construction (notamment l’assouplissement des normes pour les projets de construction de logements, ou encore la réduction des délais de traitement des recours contentieux et la lutte contre les recours abusifs).
Didier GANIER
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